Télé réal…, oh que non !!

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ans quelques jours, France 2 va mettre à l’antenne une toute nouvelle émission (« Une semaine sans les femmes ») qui fait, depuis de longs mois, déjà parler d’elle puisqu’elle marquerait l’arrivée d’un genre quasiment inédit à la télévision publique (veine tentative avec « Repas de famille » sur France 3 à la rentrée 2010), la « télé réalité« . Mot imprononçable il y a encore quelques mois de cela, il semblerait que la nouvelle direction ne fasse pas non plus de ce mot son argumentaire de vente. Explications avec images à l’appui.

Avant toutes choses, présentons d’abord le principe de cette émission réalisée par la filiale française de la société de production de la BBC. Il s’agit de vider pendant une semaine un village français de toutes les femmes et de ne laisser que les hommes, seuls face à toutes les tâches de vie du quotidien. Par ailleurs, c’est également l’occasion de tester les liens et l’éloignement que vont ressentir les couples pendant cette semaine.

Pour promouvoir cet événement qui va arriver à l’antenne le 8 mars prochain (à l’occasion de la journée de la femme), France 2 a déployé un dispositif média massif, notamment à l’aide de différents types de vidéos. Environ quatre semaines avant le lancement à l’antenne, une première bande annonce a fait son apparition, suivie d’un entretien mené avec la présentatrice / narratrice de cette émission Véronique Mounier puis enfin un reportage de dix sept minutes censé nous faire découvrir les coulisses de réalisation de ce programme.

Chacune de ces vidéos est tout à fait caractéristique d’un genre que le service s’était jusqu’à présent refusé à mettre à l’antenne. En effet, la bande annonce (disponible ci-dessous) est construite de manière similaire à ce que l’on pourrait trouver sur n’importe quelle chaîne commerciale. Pour s’en apercevoir, il suffit de regarder comment cette vidéo empreinte dans sa première partie, tous les codes du privé. Phrases accrocheuses, musique rythmée, création artificielle de tension, etc. La seconde moitié fait quant à elle apparaître des extraits de l’émission où l’on insiste par l’image sur le côté véridique, la quotidienneté d’une situation qui est filmée sans être scénarisée.

Et c’est en cela que cette bande annonce dénote de la limite éditoriale que France 2 est en train de franchir. Car filmer un quotidien ordinaire qui ne réponde pas à un angle spécifique d’information, c’est introduire la notion de « télé réalité » dans ce programme. Mais cette catégorisation, les dirigeants de la chaîne semblent vouloir le réfuter en bloc car en fin de bande annonce, on assiste à une cène pour le moins surprenante. Après l’apparition du titre « Une semaine sans les femmes« , on voit en surimpression tout une série d’autres restrictions que cette émission nous promet. Quelques exemples : « sans confessionnal« , « sans tentatrices« , « sans piscine« , « sans jury« , « sans éliminations« , etc. Bref toutes les caractéristiques qui sont identitaires du genre « télé réalité« . La question qui demeure est : pourquoi vouloir à ce point se dédouaner de quelque chose si ce n’est parce que l’on a peur de ressembler à l’original. Une question qui doit beaucoup interpeler à France Télévisions et que cette bande fait tout sauf la dissiper.

Ensuite, parmi l’arsenal de vidéos, il existe une interview de Véronique Mounier ainsi que dix sept minutes de coulisses de tournage. Beaucoup d’images et de paroles (disponibles dans les vidéos ci-dessous) mais pourquoi faire au juste ?

Nous présenter l’émission ? La bande annonce de moins d’une minute réussit parfaitement à le faire. Apporter un point de vue sociétal et scientifique de cette expérience cathodique. Nullement. Alors à quoi tout cela peut-il servir ? A regarder tout cela de plus près, on se rend rapidement compte que ces deux vidéos ne sont rien d’autre que des documents de justification sur la fabrication et la promesse associée au programme. Je m’explique.

Tandis que France Télévisions veut à tout prix se désolidariser du genre « télé réalité« , elle a pratiqué la politique de la transparence en mettant un maximum de contenu de coulisses à disposition du public afin que lui même, avant de venir voir l’émission, soit convaincu que ce que nous allons voir n’est en aucune manière soumis à une quelconque scénarisation. Entre tournage chez l’habitant, visualisation des techniciens qui sillonnent le village de part et d’autre et préparation au jour le jour des plannings de tournage, tout nous est montré et démontré quant à la véracité de ce projet.

Il en va de même de l’entretien accordé par Véronique Mounier, qui ne fait que mettre des mots sur les sois-disantes promesses du programme.

Enfin, si l’on considère ces trois vidéos dans un corpus commun, on se rend compte que ces trois vidéos assènent le même message à savoir que « Une semaine sans les femmes » n’est en aucune manière une émission de « télé réalité« . N’ayant pas encore vu le programme je ne peux dire si cela est complètement faux ou non, même si il demeure important de garder à l’esprit que le genre « télé réalité » est protéiforme dans sa mise en images et sa narration. Cependant, ce corpus de vidéos est intéressant dans le mode de narration de cette promesse puisque l’on a indifféremment affaire à quelque chose qui se rapproche de la parodie (la bande annonce), une justification orale (l’entretien) mais également à une véridification par l’image comme preuve « irréfutable« .

Néanmoins, la question demeure : pourquoi vouloir à ce point se dédouaner de quelque chose si ce n’est parce que l’on a peur de ressembler à l’original ?

BANDE ANNONCE « UNE SEMAINE SANS LES FEMMES« 

COULISSES ET CAMPAGNE DE COMMUNICATION « UNE SEMAINE SANS LES FEMMES« 

INTERVIEW DE VERONIQUE MOUNIER, ANIMATRICE DE « UNE SEMAINE SANS LES FEMMES« 

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